VALORISATION SCIENTIFIQUE
thèses
Liste des thèses d’Université soutenues publiquement à ce jour à partir des données AGRICAN
La population agricole est exposée à de multiples aéro-contaminants (poussières organiques et ses micro- organismes, pesticides, gaz d’échappement) potentiellement délétères voire protecteurs selon les pathologies respiratoires. L’objectif est d’estimer l’effet de certaines expositions agricoles (exposition directe et indirecte aux pesticides, gaz d’échappement) sur le risque de cancers broncho-pulmonaires et de bronchite chronique. Les analyses reposaient sur les cohortes AGRICAN (environ 180 000 personnes affiliées à la MSA, 11 départements français, 388 cancers pulmonaires) et AHS (environ 50 000 agriculteurs et leurs conjoints, 2 Etats des Etats-Unis, 441 cancers pulmonaires). Une étude transversale sur la santé respiratoire de 322 actifs agricoles a également été mise en place dans le Calvados. Après ajustement sur le tabagisme, des déficits de risque d’environ 50% de cancers broncho-pulmonaires ont été observés chez les éleveurs de bovins (≥ 30 ans d’ancienneté). Parallèlement, des excès de risque de ce cancer ont été associés avec la récolte de pois fourragers, la réalisation de la taille en arboriculture et avec la conduite journalière de tracteurs diesel chez des cultivateurs (risques supérieurs à 2). Le risque de bronchite chronique était augmenté chez les éleveurs de bovins et les cultivateurs de pomme de terre en France. Les analyses à venir porteront sur le rôle de l’exposition à des pesticides spécifiques sur la santé respiratoire, à l’aide de la matrice Pestimat. Des efforts seront apportés pour identifier les déterminants de l’exposition directe (et indirecte) aux pesticides, aux poussières organiques et aux gaz d’échappement d’engins agricoles
L’agriculture est un environnement professionnel exposant à de multiples contaminants (pesticides, poussières…), associé régulièrement à la survenue de nombreuses pathologies. Seuls les pesticides ont été souvent étudiés mais le rôle de pesticides spécifiques reste peu documenté notamment en France, premier pays utilisateur de pesticides en Europe. L’objectif de la thèse était d’identifier les déterminants associés aux cancers hormono-dépendants. Ce projet repose sur les données de la cohorte AGRICAN portant sur plus de 180 000 sujets. Plus de 11 000 cancers ont été identifiés par croisement avec les registres de cancers (2538 cancers de la prostate et 1087 cancers du sein). A côté des cancers liés à l’imprégnation tabagique retrouvés moins fréquemment, plusieurs cancers étaient plus fréquents (prostate, lymphomes non Hodgkiniens, myélomes multiples, mélanomes et cancers de lèvres). Les utilisateurs d’insecticides sur bovins, notamment sur les plus gros élevages, les applicateurs de pesticides sur certaines cultures (arboriculture, céréales, pommes de terre et tabac) et particulièrement ceux ne portant pas de gants de protection, les personnes réalisant des tâches de réentrée dans ces mêmes secteurs avaient un risque augmenté de cancer de la prostate. L’exposition potentielle aux insecticides organochlorés (estimée grâce à la matrice cultures-expositions PESTIMAT) augmentait également le risque de cancers de la prostate. Alors que les agricultrices présentaient un risque diminué globalement de cancer du sein, les cultivatrices de pois fourragers et les maraîchères présentaient un risque augmenté. Les résultats semblaient différents selon le statut ménopausique des femmes.
Dans la littérature internationale, les expositions agricoles aux pesticides constituent une hypothèse privilégiée pour expliquer l’excès de tumeurs cérébrales observé chez les agriculteurs. L’objectif de cette thèse, élaborée à partir des données de la cohorte Agrican, était d’investiguer le rôle des expositions agricoles aux pesticides dans l’incidence des principaux types histologiques de tumeurs du système nerveux central. Avec plus de 180 000 participants suivis depuis 2005, la cohorte Agrican est une des plus grandes études sur la santé en milieu agricole. En tenant compte des principaux facteurs de confusion, des comparaisons internes ont fait apparaitre des augmentations de risque chez les agriculteurs, plus marquées chez les utilisateurs de pesticides, et avec de fortes variations selon les types de cultures et d’élevages. Suite à ces premières analyses, un travail de priorisation a permis d’identifier les pesticides carbamates comme prioritaires à étudier en lien avec les tumeurs cérébrales. La poursuite du développement de la matrice Pestimat a ensuite permis de reconstituer l’historique des utilisations de carbamates depuis 1950 dans les principaux contextes agricoles français. À l’issue de ces étapes intermédiaires, des analyses de survie menées chez les participants d’Agrican ont fait apparaître des augmentations de risque de gliomes et de méningiomes en lien avec les expositions professionnelles à des matières actives (dithio/thio)-carbamates, en particulier avec celles dont l’utilisation a été recommandée en viticulture, en arboriculture et sur cultures de pomme de terre et de betterave. Ces résultats renforcent les preuves de cancérogénicité pour les pesticides déjà suspectés pour d’autres cancers et attirent l’attention sur d’autres matières actives, moins documentées dans la littérature mais relativement homogènes au niveau des structures chimiques. Aussi, sur la base de ces résultats et dans un objectif de santé publique, il paraît essentiel de poursuivre les efforts engagés pour réduire les expositions aux pesticides des agriculteurs.
Les expositions professionnelles agricoles, et notamment l’exposition aux pesticides, ont été associées à divers effets négatifs, sur la fertilité, le déroulement de la grossesse et le développement de l’enfant. Peu d’études se sont intéressées à des activités agricoles spécifiques excepté le travail sous serre et la floriculture et aucune n’a été à ce jour conduite en France. (1) L’interrogation de plus de 800 femmes, incluses dans la cohorte AGRIculture & CANcer (AGRICAN) et ayant eu une grossesse depuis l’inclusion (2005), grâce à 2 questionnaires rétrospectifs a montré un allongement du délai nécessaire à concevoir en lien avec l’emploi sur une exploitation agricole, le travail de nuit ou l’exposition à des vibrations. Des augmentations de risque d’avortements spontanés et de malformations ont également été observées mais restent à confirmer. (2) Le développement d’une méthode d’analyse multi-résidus a permis de mesurer 25 pesticides différents parmi 116 recherchés dans les urines de femmes travaillant sur des exploitations de poly-culture élevage. Les herbicides étaient les plus fréquemment détectés, notamment en lien avec la présence de maïs sur l’exploitation ou de tâches réalisées au contact des animaux d’élevage. Le glyphosate ou son métabolite AMPA étaient retrouvés dans 85% des échantillons.Un projet de recherche poursuivra les travaux engagés en s’intéressant au développement cognitif des enfants nés depuis 2005.
Contexte. La population agricole française, dans son ensemble, présente un plus faible risque de Cancer BronchoPulmonaire (CBP) par rapport à la population générale. Ce constat, retrouvé au niveau international, s’explique au moins en partie par un tabagisme plus faible notamment chez les plus âgés et chez les femmes ; un effet « protecteur » des endotoxines est également suspecté. Néanmoins le milieu professionnel agricole peut exposer à de nombreux cancérogènes pulmonaires avérés ou suspectés ; malgré cela, à l’exception de certains secteurs d’élevage, il n’existe que très peu de données sur les associations entre expositions ou situations de travail précises en milieu agricole et le risque de CBP. Objectifs. Le premier objectif de ce travail de thèse était d’étudier les associations, au sein de la cohorte AGRICAN (AGRIculture et CANcer), entre (1) CBP et exposition aux activités et tâches de cultures ; (2) CBP et utilisation de pesticides arsenicaux et herbicides dinitroanilines, et de mettre à profit le nombre important de sujets inclus et de cas de CBP pour réaliser ces analyses par sous-type histologique. Le deuxième objectif était d’initier un projet de métrologie de divers aérocontaminants en milieu professionnel agricole. Méthodes. Les analyses ont été menées en utilisant les données de l’étudeAGRICAN et de la matrice culture-exposition aux pesticides PESTIMAT. Nous avons utilisé un modèle de Cox, ajusté sur le sexe, le tabagisme, les élevages bovin et équin. Le projet métrologique AirExpA s’est limité à la Normandie, avec mesures personnelles des poussières totales (en temps réel), endotoxines et 38 mycotoxines (en cumulé), en élevage bovin, lors des foins et des moissons de blé/orge et pois fourrager/féverole. Résultats et discussion. Nous avons retrouvé une association inverse entre l’activité de culture de maïs et le risque de CBP, une association positive entre adénocarcinomes et viticulture, ainsi qu’entre carcinomes à petites cellules et culture de pois fourragers/féveroles. Les éléments de plausibilité d’un lien entre ces secteurs d’activité et le risque de CBP sont encore des hypothèses : la culture de maïs, par le stockage du grain, pourrait exposer aux endotoxines ; à l’inverse, la récolte de pois fourragers a été décrite comme empoussiérante, mais cet élément doit être confirmé par une caractérisation des poussières. Nous n’avons pas retrouvé d’association entre utilisation de pesticides arsenicaux, ni de dinitroanilines, et risque de CBP ; cependant les analyses stratifiées sur le sexe et le statut tabagique, montraient des associations positives chez les non-fumeurs et chez les femmes (en particulier pour les adénocarcinomes). Enfin, le projet AirExpA a permis de documenter un gradient d’exposition aux poussières et endotoxines en fonction de différentes tâches en élevage bovin, et une exposition plus modérée mais réelle, aux endotoxines, lors des activités de culture. Les analyses de mycotoxines sont toutes revenues inférieures aux limites de quantification. L’analyse des pics d’exposition, l’étude d’autres aérocontaminants et d’autres secteurs agricoles, sont des perspectives de ce projet. Conclusion. Notre travail soulève de nouvelles questions de recherche quant à des associations possibles entre certaines expositions professionnelles en milieu agricole (cultures et tâches, utilisation de certains pesticides) et risque de CBP, et contribue à une meilleure connaissance des expositions professionnelles des agriculteurs aux aérocontaminants.