Le contexte

L’agriculture française est au premier plan en Europe pour de nombreuses productions mais aussi pour l’utilisation de pesticides. Or, la littérature scientifique montre des risques pour la santé des professionnels agricoles.

Les cancers : la première cause de décès en France

En France, comme dans de nombreux pays à hauts revenus, les cancers représentent aujourd’hui la première cause de décès, dans l’ensemble de la population. Depuis l’année 2004, les cancers, avec un peu plus du quart des décès, dépassent les causes cardiovasculaires et sont responsables chaque année de la mort d’environ 170 000 personnes en France. Le cancer est également la première cause de décès prématurés, survenant avant 65 ans.
Grâce aux progrès des techniques de diagnostic et des moyens thérapeutiques, la survie des personnes atteintes augmente.

Un nombre de nouveaux cas qui continue de progresser

D’après les données issues des registres de cancers du réseau Francim, près de 400 000 nouveaux cas de cancer seraient diagnostiqués chaque année en France. Ce nombre augmente car la taille de la population française s’accroît, l’espérance de vie progresse et certains cancers sont diagnostiqués plus précocement. Même en prenant en compte ces facteurs démographiques, l’incidence continue de progresser pour certains cancers, probablement en lien avec des facteurs de risque exogènes. Pourtant, près d’un cancer sur deux serait « évitable » parce que lié à un ou des facteurs sur lesquels on peut agir. C’est notamment le cas des cancers liés à l’alcool, au tabac, à notre alimentation ou à nos modes de vie. Ainsi le tabagisme est mis en cause dans 80% des cancers du poumon, 70% des cancers des voies aérodigestives et 35% des cancers de la vessie.

en savoir plus

Santé Publique France :

https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/cancers

Centre International de Recherche sur le Cancer :

https://gco.iarc.fr/includes/PAF/PAF_FR_report.pdf

Les cancers liés à l’activité professionnelle : des cancers évitables

La lutte contre le cancer ne s’appuie pas seulement sur la prise en charge thérapeutique mais aussi sur l’identification et la diminution des facteurs de risque. Aujourd’hui encore, ces facteurs de risque sont mal connus pour de nombreux cancers, même pour les plus fréquents (prostate, sein,…). De manière générale, il n’est pas facile de faire la part des facteurs génétiques, environnementaux ou comportementaux dans la survenue des cancers.
Aussi, on connaît mal la part des cancers attribuable à des expositions professionnelles. Les estimations basées sur les cancérogènes avérés (groupe 1 du Centre International de Recherche sur le Cancer) font apparaître une contribution faible des expositions professionnelles : moins de 5% de l’ensemble des cancers. Cependant pour certains cancers et certaines expositions, cette contribution peut être beaucoup plus élevée : ainsi 80% des mésothéliomes sont attribuables à l’amiante. Le rôle des facteurs de risque professionnels est globalement sous-estimé et reste à déterminer même pour des cancers aussi fréquents que les cancers du sein, de la prostate, du colon et du rectum.

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Centre International de Recherche sur le Cancer Monographies sur le classement cancérogène

https://monographs.iarc.fr/fr/monographies-du-circ-actualites/

Fractions de risques attribuables :

https://gco.iarc.fr/includes/PAF/PAF_FR_report.pdf

Des expositions agricoles différentes de celles de la population générale

Le mode de vie des agriculteurs diffère à plusieurs égards de celui de la population générale, et peut sembler plus sain sur certains aspects : tabagisme moindre, exercice physique plus important, résidence loin de la pollution urbaine, alimentation plus variée… Cependant, le travail en agriculture peut aussi exposer à certaines nuisances : poussières, mycotoxines, gaz d’échappement, virus animaux, pesticides… Des questions demeurent sur les risques de cancers associés à ces nuisances. Même pour les pesticides, exposition agricole la plus étudiée, de nombreuses interrogations persistent à ce jour. Les recherches épidémiologiques ont pour objectif d’étudier le lien entre les expositions à des nuisances et la survenue de maladies chroniques – en particulier les cancers – dans la population agricole.

Comprendre le lien entre les expositions agricoles et le risque de cancer

Toutes les expositions professionnelles susceptibles d’impacter la santé des agriculteurs doivent être étudiées et donner lieu à des actions de prévention. Parmi elles, les pesticides sont l’objet d’une attention particulière car leurs usages et leur efficacité se fondent en grande partie sur leur toxicité vis-à-vis du vivant (herbes, champignons, insectes,…). Si leur impact global sur la santé humaine est aujourd’hui reconnu, des lacunes existent dans les connaissances scientifiques pour les raisons suivantes :

  • Très peu d’études sont de taille suffisante et/ou utilisent des méthodes performantes pour mesurer les expositions et/ou disposent de données de qualité sur le diagnostic de cancers ;
  • Certains pesticides n’ont été que très peu étudiés : c’est le cas notamment de pesticides très utilisés en Europe mais peu aux Etats-Unis d’Amérique, des antiparasitaires externes utilisés sur les animaux, des biocides appliqués dans les bâtiments d’élevage,...
  • La mesure des expositions aux pesticides au cours de la vie est complexe et ne dispose d’aucune méthode validée et consensuelle. Elle implique de bien comprendre le travail en agriculture : les tâches potentiellement exposantes, les pratiques, les matières actives utilisées et de parvenir à quantifier les niveaux d’exposition.

Des initiatives internationales pour faire progresser les connaissances sur la santé des agriculteurs

Les premières études épidémiologiques sur les cancers en milieu agricole se sont mises en place dès la fin des années 1970, principalement aux Etats-Unis d’Amérique et dans les pays Scandinaves. Elles ont fait émerger des hypothèses sur l’augmentation du risque de certains cancers en milieu agricole et ont justifié que des études de plus grande ampleur se mettent en place. C’est ainsi qu’en 1993, grâce au National Cancer Institute, l’Agricultural Health Study a vu le jour en Caroline du Nord et Iowa pour comprendre comment le mode de vie et le travail pouvaient affecter la santé des populations agricoles. Il s’agissait de suivre l’apparition de cancers dans une cohorte de près de 90 000 agriculteurs applicateurs de pesticides et leurs conjoints. C’est dans le même esprit et avec des objectifs comparables que la cohorte AGRICAN a été mise en place en France en 2005. En parallèle des efforts considérables ont été déployés pour mieux comprendre les expositions et développer des outils utiles aux recherches épidémiologiques sur le risque de cancer en agriculture.

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Site internet de la cohorte américaine AHS

https://aghealth.nih.gov/
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